De moins en moins d’Européens dans les essais cliniques !

Essais cliniques en Europe

D’après les chiffres d’un récent rapport de l’IQVIA pour l’European Federation of Pharmaceutical Industries and Associations (EFPIA) et Vaccines Europe, les essais cliniques auraient recruté 60 000 patients européens en moins sur les 5 dernières années. Or l’inclusion dans les essais cliniques est déterminante pour l’accès aux thérapies innovantes, en particulier dans les cancers et les maladies rares.

 

Les essais cliniques quittent l’Europe pour d’autres régions du monde ?

Dans le monde, les essais cliniques ont augmenté de 38 % au cours des 10 dernières années, traduisant le dynamisme de la recherche clinique mondiale. Pourtant, cette tendance favorable ne profite pas à tous les territoires. En effet, sur la même période, entre 2013 et 2023, la part des essais cliniques européens (parrainés par une société pharmaceutique) a diminué, passant de 22 % en 2013 à 12 % en 2023. Tous les pays européens ou presque sont touchés par ce phénomène.

Concrètement, ces chiffres impactent le nombre de patients européens inclus dans les essais cliniques, qu’il s’agisse d’essais cliniques internationaux ou d’essais cliniques sur le territoire européen exclusivement. Le rapport de l’IQVIA estime à 60 000 la baisse du nombre de patients inclus dans les essais cliniques mondiaux au cours des 5 dernières années et à 20 000 pour les essais cliniques sur le territoire européen.

La baisse de la part des patients européens dans les essais cliniques s’accompagne d’une hausse des essais cliniques dans d’autres régions du monde. Ainsi, la Chine a doublé son nombre d’essais cliniques depuis 2018 et représente désormais 18 % des essais cliniques commerciaux mondiaux.

 

Un contexte défavorable à la recherche clinique commerciale en Europe

Au-delà d’une évolution des équilibres entre les zones géographiques, cette tendance à la baisse des essais cliniques en Europe pose clairement la question de l’attractivité de l’Europe pour la recherche clinique. De nombreux experts pointent du doigt un contexte réglementaire et financier moins favorable pour les sociétés pharmaceutiques. La réglementation européenne contraint plus fortement la mise en place et l’accès aux essais cliniques. Les essais mettent plus de temps à se lancer en Europe qu’aux USA ou en Chine, ce qui constitue un frein pour les sociétés pharmaceutiques.

À noter d’ailleurs que le contexte juridique des essais cliniques menés en Europe évolue au 31 janvier 2025, suite à la mise en place du règlement européen n°536/2014 relatifs aux essais cliniques de médicaments. Entré en vigueur le 31 janvier 2022, ce règlement européen prévoyait une phase de transition pour les essais cliniques déjà en cours, cette phase de transition s’achevant au 31 janvier 2025. À compter de cette date, tout essai clinique portant sur un médicament ou un médicament de thérapie innovante autorisé sous la directive EC et disposant d’au moins un centre sur le territoire français devra se conformer à ce nouveau règlement.

La baisse des essais cliniques en Europe s’accompagne aussi d’un ralentissement de l’activité des sociétés de biotechnologies européennes. Sur ce secteur aussi, l’Europe perd des places au profit des USA et de la Chine. Or les sociétés de biotechnologies jouent un rôle essentiel dans l’innovation et contribuent largement à la recherche clinique. En 2022, les sociétés de biotechnologies européennes ont initié 17 % des essais cliniques, contre 20 % pour les sociétés chinoises. La biotech chinoise – en pleine expansion – a d’ores et déjà dépassé la biotech européenne et constitue désormais un concurrent de poids face au leader historique que sont les USA.

 

Un accès plus compliqué aux médicaments innovants pour les patients européens ?

La baisse du nombre de patients inclus dans un essai clinique en Europe entraîne de multiples conséquences :

  • Elle réduit l’attractivité de l’Europe en matière de recherche clinique, mais aussi de production pharmaceutique ;
  • Elle augmente la pression sur la recherche clinique académique, augmentant de fait les financements nécessaires pour soutenir la recherche publique dans les pays européens ;
  • Elle impacte négativement l’accès des patients aux médicaments innovants ;
  • Elle augmente les coûts des médicaments pour les États européens.

 

Participer à un essai clinique permet aux patients d’accéder plus rapidement aux nouveaux médicaments, en moyenne entre 5 et 10 ans avant leur mise sur le marché. Ce rôle crucial des essais cliniques dans l’accès précoce aux médicaments innovants est d’ailleurs souligné en France comme dans plusieurs autres pays européens. Tous les domaines sont concernés par cette tendance à la baisse des essais cliniques européens, notamment :

  • L’oncologie ;
  • La vaccination ;
  • Les maladies rares ;
  • Les thérapies cellulaires et géniques ;
  • La pédiatrie.

 

Ce recul de la recherche clinique européenne financée par des sociétés pharmaceutiques se fait ressentir dès les essais de phase 1, les premiers à lancer les phases de développement d’un futur médicament. Ce retard d’accès des patients européens aux médicaments innovants ne peut le plus souvent pas être compensé par les dispositifs d’accès précoce mis en place dans certains pays, dont la France.

Dans ce contexte, comment rendre le territoire européen plus attractif pour la recherche clinique commerciale, dans un contexte international de plus en plus compétitif ? Relancer les essais cliniques commerciaux en Europe représente un défi majeur pour les pays européens, afin de garantir l’accès des patients aux médicaments de demain.

 

Sources

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