Les analogues du GLP-1, de l’obésité aux addictions ?

GLP-1

Alors que le sémaglutide est désormais disponible en France dans le traitement de l’obésité, rejoint il y a quelques jours par le tirzépatide (double agoniste du GLP-1 et du GIP (Glucose-dependent Insulinotropic Polypeptide)), les analogues du GLP-1 pourraient bientôt voir leurs indications s’élargir. Les chercheurs s’intéressent notamment à leur action sur les addictions.

 

Les analogues du GLP-1, capables de réduire l’appétit mais aussi l’envie de consommer une substance psychoactive

Les analogues du GLP-1 (Glucagon-Like Peptide-1) agissent sur un peptide synthétisé par l’intestin, le GLP-1. Rapidement, la communauté scientifique et médicale s’est passionnée pour les 3 actions principales de ce peptide :

  • La régulation de la glycémie ;
  • Le ralentissement de la vidange gastrique ;
  • La diminution de l’appétit.

 

Ces trois actions, particulièrement intéressantes dans la prise en charge de l’obésité et du diabète de type 2, ont suscité le développement des analogues du GLP-1. Des médicaments devenus rapidement très médiatiques et qui font depuis l’objet de multiples attentions. Les chercheurs s’intéressent entre autres aux autres potentialités de ces médicaments, parmi lesquelles un rôle dans les addictions.

Dès les années 2010, des premières études chez l’animal (rongeurs et primates) ont exploré les potentialités anti-addictives des analogues du GLP-1. En dehors de la sécrétion intestinale de GLP-1, ce peptide est aussi produit dans le cerveau – au niveau d’une zone appelée le noyau du tractus solitaire – où il agit comme un neurotransmetteur pour plusieurs régions cérébrales, parmi lesquelles des régions impliquées dans les comportements addictifs.

Les études menées chez l’animal ont montré un intérêt des analogues du GLP-1 dans la réduction de la consommation d’alcool ou de drogues. Ces premiers résultats ont aussitôt motivé le lancement d’études complémentaires et d’essais cliniques.

 

Une action sur les envies irrépressibles de consommer une substance psychoactive

Ces derniers mois, les publications scientifiques sur les potentialités des analogues du GLP-1 se sont multipliées. L’association IUPHAR (International Union of Basic and Clinical Pharmacology) a notamment publié une revue de littérature dans la revue scientifique Pharmacological Research, décrivant les analogues du GLP-1 comme une alternative pharmacothérapeutique émergente dans les troubles de l’usage de substances. Mais cette revue pointe aussi du doigt les étapes qui restent à franchir pour considérer ces médicaments comme des traitements des addictions :

  • Mieux comprendre leurs mécanismes dans les comportements addictifs ;
  • Déterminer leur efficacité et leur sûreté dans le traitement des addictions ;
  • Préciser s’ils agissent indifféremment sur tous les comportements addictifs ou uniquement sur certaines addictions ;
  • Évaluer quels patients pourraient-être éligibles à de tels traitements, avec quelle posologie et sur quelle durée.

 

Les résultats des essais cliniques spécifiques sont évidemment très attendus, et pour l’instant la plupart des données disponibles concernent l’étude des comportements addictifs chez des patients traités par analogues du GLP-1 dans une autre indication (diabète de type 2 et/ou obésité). D’après les données disponibles, les analogues du GLP-1 pourraient réduire les envies irrépressibles de consommation de substances addictives, qu’il s’agisse de tabac, d’alcool ou de drogues. Ainsi, ils pourraient agir positivement sur les comportements addictifs et réduire les conséquences des addictions en termes de morbidité et de mortalité.

 

Un espoir pour améliorer le sevrage et l’abstinence ?

L’intérêt des chercheurs et des médecins pour les propriétés anti-addictives des analogues du GLP-1 répond à un double objectif : d’une part élargir le champ des indications thérapeutiques des analogues du GLP-1, d’autre part proposer un traitement efficace contre les comportements addictifs. Les addictions représentent un enjeu majeur de santé publique en France, comme en témoignent les chiffres 2023 de l’Observatoire français des drogues et des tendances addictives (OFDT). L’alcool et le tabac restent les deux substances les plus consommées en France, avec respectivement 25,5 % de fumeurs adultes quotidiens et 10 % de buveurs quotidiens d’alcool. Mais les addictions concernent aussi d’autres substances cette fois illicites :

  • Le cannabis (un adulte sur 2 en France l’a déjà expérimenté et depuis 1992 son usage quotidien a plus que doublé dans la population) ;
  • Les autres drogues illicites (cocaïne, ecstasy, héroïne, …), avec 14,6 % des 18-64 ans qui ont déjà expérimenté des drogues autres que le cannabis.

 

Le diagnostic et la prise en charge des addictions sont essentiels pour prévenir les conséquences sur la santé physique et mentale et sur la vie personnelle, sociale et professionnelle des sujets concernés. Mais aujourd’hui, les alternatives thérapeutiques disponibles (sevrage, traitements de substitution, traitements pharmacologiques, soutien psychologique, …) restent insuffisantes pour certains patients. Le principal défi reste souvent de maintenir l’abstinence après la phase initiale de sevrage. La perspective de traitements capables de réduire l’envie irrépressible de consommer une substance addictive pourrait offrir une nouvelle solution aux patients. Les analogues du GLP-1 pourraient-ils ainsi révolutionner la prise en charge des addictions, comme ils semblent être en passe de le faire pour le diabète de type 2 et l’obésité ?

 

Sources

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