Pas une semaine ne se passe sans que les prouesses de l’intelligence artificielle (IA) ne soient mises en avant. Et le monde de la santé n’échappe pas à la règle. L’IA en santé pourrait profondément modifier le diagnostic et la prise en charge des maladies, mais aussi la recherche pharmaceutique.
L’IA, prometteuse à toutes les étapes de la recherche pharmaceutique
L’IA peut être un outil précieux dans plusieurs domaines de la recherche médicale et pharmaceutique :
- La découverte de nouveaux médicaments, par exemple en guidant les chercheurs sur les interactions moléculaires entre les médicaments et leurs cibles thérapeutiques ;
- L’optimisation des essais cliniques, grâce à la capacité de l’IA à analyser d’importantes quantités de données médicales ;
- La personnalisation des traitements, en prenant en compte une multitude de paramètres liés à la maladie et au patient ;
- La réduction des phases de développement en se basant sur les capacités analytiques hors normes de l’IA.
Comme pour tous les outils d’IA développés en santé, l’objectif n’est pas de remplacer les chercheurs et les équipes médicales, mais de leur faire gagner du temps et d’optimiser chaque étape dans le développement de nouveaux médicaments.
De la chimie combinatoire au drug design accompagné par l’IA
Dans les années 1980, la chimie combinatoire a révolutionné la découverte des médicaments, grâce entre autres aux tests biologiques miniaturisés à haut débit. Couplée aux nouvelles techniques de biologie moléculaire, elle a rapidement permis de constituer d’importantes banques de données – les chimiothèques – criblées ensuite sur différentes cibles thérapeutiques. C’est ainsi notamment que les chercheurs ont parfois découvert de nouvelles indications thérapeutiques pour des médicaments relativement anciens.
L’arrivée de l’IA ouvre une nouvelle ère dans le drug design initié par la chimie combinatoire. Capable d’analyser d’immenses bases de données biologiques, génétiques et moléculaires en un temps réduit (il faudrait compter des années, voire des décennies, avec les seules capacités humaines), l’IA permet d’accélérer les découvertes de médicaments. De plus, elle vient renforcer les capacités de la chimie combinatoire en générant de manière automatisée des candidats médicaments, en fonction des propriétés chimiques, des propriétés biologiques et des propriétés pharmacocinétiques. Certains outils d’IA peuvent par exemple prédire la structure tridimensionnelle de 200 millions de protéines connues en seulement une année ! L’IA devrait ainsi devenir rapidement incontournable pour le développement des futurs médicaments.
Des essais cliniques “in silico”
Une fois que les chercheurs ont découvert une molécule aux propriétés biologiques prometteuses dans des essais in vitro, vient le délicat processus des essais cliniques. Ce processus, long de plusieurs années et particulièrement coûteux, décidera de la naissance d’un nouveau médicament ou de l’abandon de la molécule candidate.
À ce niveau aussi, l’arrivée de l’IA constitue une véritable révolution, grâce au déploiement des essais “in silico”. Ces essais correspondent à des simulations et des modélisations informatiques, capables de simuler des essais cliniques ou d’analyser d’importantes quantités de données, par exemple des résultats d’imagerie médicale ou de séquençage génomique. Les équipes de recherche se tournent ainsi de plus en plus vers les jumeaux numériques, des modèles informatiques utilisant l’IA pour reproduire très finement les caractéristiques ou les comportements d’un individu donné. Il s’agit en quelque sorte d’essais cliniques virtuels.
Optimiser les essais cliniques grâce à de tels outils permet de raccourcir le délai de développement des médicaments, offrant aux laboratoires pharmaceutiques une perspective de réduction des coûts de développement et aux patients des délais raccourcis d’accès à de nouveaux traitements.
Quelle éthique pour l’IA dans la recherche pharmaceutique ?
L’IA pourrait rapidement révolutionner la recherche pharmaceutique. Mais dans quel contexte éthique et réglementaire ? L’IA travaille sur des quantités colossales de données, mais comment ces données sont-elles protégées, en particulier lorsqu’il s’agit de données médicales ? L’Europe s’est dotée en janvier 2024 d’une nouvelle réglementation de l’usage de l’IA, l’IA Act. Les algorithmes et les outils développés avec l’IA doivent respecter des normes légales et éthiques pour protéger la confidentialité des données des patients.
Par ailleurs, les autorités de régulation exigent que les outils d’IA soient régulièrement évalués pour s’assurer de leur conformité, de leur sécurité et de l’absence de biais, à la fois dans les données et dans les analyses. Malgré leurs capacités hors normes, il est capital de pouvoir contrôler les outils d’IA pour garantir la sécurité des patients.
Accélération de la découverte de médicaments, essor de la médecine personnalisée, amélioration de la pharmacovigilance, .. les perspectives offertes par l’IA sont multiples et constituent une avancée majeure vers la médecine de demain, à condition de définir des règles et des moyens de contrôle garantissant éthique et sécurité.
Sources
- IQVIA. Pour Google DeepMind, l’IA est prête à accélérer la recherche pharmaceutique. 14 octobre 2024. https://pharmastat.iqvia.com/actualites/pour-google-deepmind-l-ia-est-prete-a-accelerer-la-recherche-pharmaceutique
- BPIFrance. L’impact de l’IA sur l’industrie pharmaceutique : vers une nouvelle ère de la recherche médicale. 9 septembre 2024. https://bigmedia.bpifrance.fr/nos-dossiers/limpact-de-lia-sur-lindustrie-pharmaceutique-vers-une-nouvelle-ere-de-la-recherche-medicale
- L’intelligence artificielle au service de la recherche médicale et pharmaceutique. Digitalpharma Lab. Consulté le 15 novembre 2024. https://www.digitalpharmalab.com/digital-pharma-review/lintelligence-artificielle-au-service-de-la-recherche-medicale-et-pharmaceutique