Les inégalités hommes-femmes en santé persistent en France 

Les études et les travaux sur les inégalités entre les hommes et les femmes se multiplient depuis plusieurs années. Et le secteur de la santé n’échappe pas à cette tendance. Si l’espérance de vie à la naissance est supérieure chez les femmes, des inégalités persistent et les femmes se sentent globalement en moins bonne santé que les hommes. Santé Publique France a rappelé récemment l’importance de prendre en compte ces inégalités et de mettre en place des mesures pour les réduire.

 

Une espérance de vie plus longue grâce à un mode de vie plus sain ?

D’après les données de l’INSEE de 2019, l’espérance de vie à la naissance des garçons est de 79,7 ans, et l’espérance de vie sans incapacité de 63,7 ans. Chez les filles, ces chiffres s’élèvent respectivement à 85,6 ans et 64,6 ans. Les filles, plus nombreuses à la naissance, vivraient ainsi plus longtemps que les garçons. Pour expliquer un tel écart, il est possible d’avancer des arguments biologiques, mais aussi des facteurs environnementaux. Les femmes auraient globalement un mode de vie plus sain que les hommes.

Les différences de mode de vie entre les femmes et les hommes concernent différents aspects :

  • Le tabagisme quotidien, 26 % des femmes de 25 à 34 ans fument quotidiennement contre 36 % chez les hommes ;
  • La consommation d’alcool, 28 % des femmes déclarent boire de l’alcool chaque semaine, contre 50,5 % chez les hommes ;
  • L’alimentation, avec un meilleur respect des recommandations nutritionnelles chez les femmes, excepté pour les aliments sucrés.

En revanche, les femmes sont moins nombreuses (42 %) que les hommes (68 %) à pratiquer une activité physique régulière, conforme aux recommandations de l’OMS.

Depuis le début des années 2000, les observateurs notent que l’écart entre les hommes et les femmes en matière d’espérance de vie se réduit. L’espérance de vie sans incapacité des hommes progresse régulièrement, tandis que celle des femmes s’est stabilisée   . Ce phénomène serait lié justement à un changement de mode de vie des femmes, qui se rapprocherait de plus en plus de celui des hommes. Par exemple, les femmes sont de plus en plus nombreuses à boire d’importantes quantités d’alcool ponctuellement.

 

Une perception différente de la santé

Espérer pouvoir vivre plus longtemps que les hommes, y compris sans incapacité, ne permet pas aux femmes de se sentir en bonne santé. En 2019, chez les personnes âgées d’au moins 16 ans, 65 % des femmes se considéraient en bonne santé, contre 69 % des hommes.

Cet écart dans la perception de la santé se révèle variable selon les catégories de population, avec un écart plus élevé dans les catégories de population avec un faible niveau socio-économique. Cette tendance s’explique en partie par une vulnérabilité sociale et économique accrue des femmes, et en particulier des femmes seules. L’écart est également plus marqué chez les jeunes, âgés de 25 à 34 ans.

La mauvaise  perception de la santé chez les femmes serait en partie liée à leurs conditions de travail. Alors qu’elles représentent près de la moitié de la population active, elles sont encore confrontées à des inégalités d’emploi, de conditions de travail et de rémunération. L’impact du travail sur la santé se fait donc plus fortement ressentir chez les femmes. La souffrance psychique au travail est ainsi deux fois plus élevée chez les femmes que chez les hommes.

Conséquence de cet écart de perception de la santé entre les hommes et les femmes, un recours différent aux soins. En 2019, les femmes étaient plus nombreuses à consulter que les hommes, alors que les hospitalisations ne montraient pas de différence notable selon le sexe. Cette différence dans le recours aux soins s’avère le plus important pour la consultation d’un médecin spécialiste.

 

Un système de santé inégal pour les hommes et les femmes

Biologiquement, les femmes et les hommes présentent des différences physiologiques, mais aussi pathologiques. Et ces différences ne concernent pas uniquement des pathologies spécifiquement féminines ou masculines. Or, les études et les recherches ont été historiquement menées sur des populations masculines et calquées sur le fonctionnement de l’organisme masculin. Les spécificités féminines ont longtemps été passées sous silence.

Le dernier rapport du Haut Conseil à l’Egalité entre les femmes et les hommes a d’ailleurs montré que le fait d’être une femme ou un homme pouvait influencer le diagnostic de certaines maladies, notamment les maladies cardiovasculaires ou les troubles de la santé mentale, comme la dépression. Citons l’exemple de l’infarctus du myocarde. Pendant des décennies, cette pathologie a été présentée comme une pathologie largement masculine, survenant chez les hommes de plus de 50 ans. On sait aujourd’hui que les femmes sont également exposées au risque cardiovasculaire, avec des atteintes spécifiques. La non prise en compte des spécificités féminines entraîne ici un sous-diagnostic et un défaut de prise en charge, alors même que la mortalité cardiovasculaire augmente chez les femmes.

Autre exemple, cette fois avec une pathologie spécifiquement féminine, l’endométriose. Pendant des siècles, les douleurs menstruelles ont été considérées comme physiologiques et il aura fallu attendre les années 1990 pour reconnaître l’endométriose comme une maladie et 2019 pour qu’un plan national consacré à cette maladie voit le jour. Pourtant, une femme sur dix en âge de procréer est touchée par cette maladie.

Réduire voire supprimer les inégalités en santé entre les hommes et les femmes implique nécessairement une meilleure prise en compte des spécificités liées au sexe. Si le sujet a été lancé dans les années 1960-1970 aux USA, les rapports et études en France datent seulement des années 2000. Réduire les inégalités implique d’inclure des femmes dans les recherches. Il est également capital d’informer et de sensibiliser tous les professionnels de santé, mais aussi le grand public, les hommes comme les femmes. Les politiques de santé publique doivent tendre vers une meilleure égalité des hommes et des femmes dans les soins, dans les parcours de santé et dans l’accompagnement. La prévention des maladies doit être déclinée pour chaque sexe.

Prendre en compte les différences liées au sexe ne reviendra pas à gommer ces différences mais à tendre vers une égalité des hommes et des femmes en matière de santé.

 

Sources

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