L’industrie pharmaceutique appelée à la rescousse face à la désinformation des influenceurs !

Le monde de la santé n’échappe pas à la montée en puissance des influenceurs. Or certains influenceurs sont à l’origine d’une désinformation qui pourrait nuire à la santé publique. Quelles sont les alternatives possibles pour les autorités de santé publique, alors que plus de 60 % des internautes reconnaissent se laisser influencer par les influenceurs ? Aux USA, l’agence américaine du médicament se tourne vers l’industrie pharmaceutique. 

La santé n’échappe pas à la vague des influenceurs

Rien qu’en France, sur les 150 000 influenceurs recensés, environ 1 000 publient sur les réseaux sociaux des contenus sur la santé, les soins, les médicaments, …. Initialement, ces leaders d’opinion provenaient exclusivement du monde de la santé, des médecins de toutes les spécialités, exerçant en ville ou à l’hôpital et des paramédicaux. Désormais, les patients et les aidants n’hésitent plus à donner leur opinion ou à partager leur expérience sur les réseaux sociaux. Ces influenceurs de la santé ne diffusent pas leurs contenus uniquement sur les réseaux sociaux, nombreux sont ceux qui ont également leur propre site internet, leur blog ou encore leur chaîne YouTube. 

Les influenceurs de la santé s’adressent à différents publics, la communauté médicale et paramédicale, les communautés de patients, mais aussi le grand public au sens large. Leur public est généralement jeune, puisque si 25 % des internautes suivent un influenceur, 40 % d’entre eux ont entre 15 et 24 ans. Certains de ces influenceurs comptent plusieurs centaines de milliers, voire quelques millions d’abonnés. Mais quels contenus proposent-ils ? Et dans quel cadre ?

De la vulgarisation scientifique et médicale à la prise de position

La plupart des influenceurs, en particulier issus du monde de la santé, diffuse des contenus visant à mieux informer les patients et le grand public. Leur objectif est une meilleure communication des informations sur un monde de la santé qui apparaît souvent complexe de prime abord. Sensibiliser sur des enjeux de santé publique, aider à comprendre des pathologies chroniques complexes, informer sur les examens médicaux ou les parcours de soins, décrypter l’actualité médicale, … autant de thématiques abordées par les influenceurs. 

Mais au-delà de la simple information, certains influenceurs affichent plus ou moins clairement leur opinion sur certains sujets de santé. Une prise de position qui peut aller jusqu’à la diffusion de fake news. Une illustration caractéristique a été ces dernières années la désinformation sur la Covid-19, la pandémie et les vaccins, massivement diffusée sur les réseaux sociaux par des influenceurs antivax. 

La puissance des influenceurs en santé soulève deux principales questions, d’une part celle de leur légitimité à diffuser de l’information en santé, et d’autre part celle de la véracité des contenus diffusés. A ce jour, aucune réglementation n’encadre les agissements des influenceurs en dehors de l’influence commerciale. En France – et c’est une exception dans le monde -, la loi n°2023-451 du 9 juin 2023 encadre l’influence commerciale, afin de lutter contre les dérives des influenceurs sur les réseaux sociaux. Mais cette loi ne contraint l’influenceur que sur les contenus sponsorisés. Elle ne permet donc pas de contrecarrer le risque de désinformation. 

L’industrie pharmaceutique, un rempart contre la désinformation ? 

Aux USA, l’agence américaine du médicament (FDA, Food and Drug Administration) a constaté à plusieurs reprises des allégations santé diffusées par des influenceurs sur les réseaux sociaux. Or ces allégations santé concernaient des indications non approuvées pour les spécialités médicales concernées. Ce type de scénario touche essentiellement les médicaments utilisés dans le traitement de l’obésité. 

Pour les autorités de santé publique américaines, ces situations équivalent à une promotion illégale d’un médicament. Si cette pratique est formellement interdite pour les industries pharmaceutiques, qu’en est-il des influenceurs ? Les directives de la FDA en la matière datent de plus de 10 ans et ne tiennent pas compte du poids que représentent désormais les influenceurs dans le monde de la santé. 

La FDA a donc proposé un projet de directive pour encadrer ses pratiques et encourager l’industrie pharmaceutique à prendre la parole sur les réseaux sociaux pour corriger la désinformation. En France, la loi sur l’influence commerciale a déjà permis de limiter ce type de désinformation. Tout dépend des liens de l’influenceur avec l’industrie pharmaceutique. En cas de contrat, le laboratoire est tenu pour responsable des contenus diffusés par l’influenceur. En l’absence de contrat, seul l’influenceur est responsable de ce qu’il diffuse sur les réseaux sociaux et l’industriel peut exercer librement son droit de réponse. Un droit qu’il serait utile de transformer en devoir afin de mieux lutter contre la désinformation. Par ailleurs, si les contenus ne concernent pas un produit de santé, aucun texte n’encadre la validité des contenus diffusés. 

La désinformation en santé a sans doute toujours existé. Preuve en est des mouvements antivax développés dès les premiers vaccins. Aujourd’hui, les réseaux sociaux élargissent le champ de diffusion des informations par les influenceurs. De nombreux experts français, européens et internationaux appellent à une régulation renforcée de l’action des influenceurs, pour mieux contrôler et réglementer l’information et les liens qui les unissent aux industriels. En attendant, les internautes sont appelés à la plus grande des vigilances sur les prises de position de certains influenceurs en santé.  

Sources

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