Paquet pharmaceutique européen : la solution pour un meilleur accès aux médicaments ?

En France comme ailleurs en Europe, les tensions d’approvisionnement ne cessent de se multiplier, une source de stress pour les professionnels de santé comme pour les patients. Au mois d’avril 2024, le Parlement Européen a adopté sa position pour réformer la législation pharmaceutique européenne, en vigueur depuis près de 20 ans. Ce nouveau paquet pharmaceutique européen se fixe trois principaux objectifs : favoriser l’innovation thérapeutique, augmenter la sécurité d’approvisionnement en médicaments et renforcer l’accessibilité de tous les Européens aux médicaments.

Qu’est-ce que le paquet législatif pharmaceutique ?

Le paquet législatif pharmaceutique européen fait référence à une mise à jour de la législation pharmaceutique européenne, initiée le 26 avril 2023. Des règles communes à tous les pays européens en ce qui concerne tous les médicaments à usage humain, basées sur une directive et un règlement. L’objectif de ce paquet pharmaceutique européen ? Faciliter la disponibilité et l’accès aux médicaments, soutenir la compétitivité et l’attractivité de l’industrie pharmaceutique européenne, et renforcer les normes environnementales. 

En avril 2024, le Parlement Européen a adopté sur ce paquet législatif pharmaceutique à la fois une nouvelle directive, adoptée à 495 voix pour et 57 voix contre, et un règlement, adopté à 488 voix pour et 67 voix contre. Le dossier a été repris par le nouveau Parlement Européen après les élections européennes du 6 au 9 juin 2024. Le 21 juin 2024, c’était au tour des ministres de la santé européens de se pencher sur les mesures incitatives de ce paquet pharmaceutique, lors du dernier conseil “santé” de la présidence belge du conseil européen. Et les mesures présentées ne font pas vraiment l’unanimité en Europe !

Une réforme de la législation pharmaceutique européenne, oui mais laquelle ?

Tous les pays sont unanimes sur la nécessité de réformer la législation européenne en matière de médicament, qui n’a pas évolué depuis 20 ans, pour mieux répondre aux enjeux actuels :

  • La gestion des crises sanitaires, à la suite de la pandémie de la Covid-19 ;
  • La lutte contre l’antibiorésistance ;
  • La protection de l’environnement, avec le concept One Health en toile de fond ;
  • L’aggravation des tensions et des ruptures d’approvisionnement.

La réforme doit également moderniser le cadre réglementaire des médicaments.

Restent à trouver des mesures sur lesquelles tous les acteurs européens s’entendent. Medicines for Europe, acteur représentant l’industrie des médicaments génériques, biosimilaires et à valeur ajoutée, appelle à renforcer l’accès équitable aux médicaments pour tous les Européens. Le sujet de la protection des médicaments et de la propriété intellectuelle est donc au cœur du débat. Les pays disposant de secteurs pharmaceutiques forts se mobilisent pour renforcer la protection et en allonger la durée, tandis que d’autres pays européens cherchent à limiter la protection pour ouvrir le marché et améliorer l’accès aux médicaments.

Entre protection du marché et protection des données, le désaccord subsiste. Les uns réclament moins de protection pour ouvrir le marché et faciliter le développement des génériques et des biosimilaires, les autres soulignent que l’Europe est en retard sur les USA et la Chine en matière d’investissements en R&D, des investissements obligatoirement associés à une protection renforcée du marché. Entre les uns et les autres, la présidence belge tente de temporiser et de trouver un accord. De nouvelles discussions sont prévues dans les prochaines semaines pour tenter d’entériner ce paquet pharmaceutique européen.

Les tensions et les ruptures d’approvisionnement, un enjeu majeur en Europe

Le débat autour du paquet pharmaceutique européen se concentre essentiellement sur les mesures d’incitation à l’innovation, basées sur les durées de protection des données réglementaires et du marché. Un enjeu capital pour l’industrie pharmaceutique européenne et les investissements dans le secteur dans tous les pays d’Europe.

Au quotidien, pour les Européens, ce sont surtout les tensions et les ruptures d’approvisionnement qui constituent un enjeu fort. En février 2024, le Groupement Pharmaceutique de l’Union Européenne (GPUE) a publié les résultats de son enquête sur les ruptures de médicaments en Europe pour l’année 2023. Tous les pays d’Europe sont concernés par ce problème, et 65 % des pays européens ont noté une dégradation de la situation en 2023. Les pharmaciens passent en moyenne près de 10 h à trouver des solutions de remplacement pour les patients, soit 3 heures de plus qu’en 2022.

Dans la directive et le règlement adoptés par le Parlement Européen, plusieurs mesures visent à améliorer la disponibilité et l’accès aux médicaments, entre autres :

  • Un plan de prévention des pénuries pour tous les médicaments et pas seulement pour les médicaments d’intérêt thérapeutique majeur, comme c’est le cas en France ;
  • L’obligation de notifier les ruptures ;
  • Une information régulière sur les stocks disponibles chez les grossistes.

Dans l’enquête du GPUE, la cause de pénurie la plus fréquemment citée est l’interruption du processus industriel. Soutenir l’innovation et donc les investissements pharmaceutiques tout en rendant les médicaments plus accessibles et abordables sont des enjeux primordiaux pour la réforme de la législation pharmaceutique. Une réforme nécessaire pour garantir demain l’accès aux médicaments de tous les Européens.


Sources

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