Quand s’arrêtera la hausse des infections sexuellement transmissibles (IST) ?

Chaque jour dans le monde, selon l’Organisation Mondiale de la Santé (OMS), plus d’un million de personnes contractent une infection sexuellement transmissible (IST). Le plus souvent sans même s’en rendre compte, car nombre d’IST restent asymptomatiques. Une trentaine de bactéries, de virus et de parasites sont impliquées dans les IST, mais 8 agents pathogènes sont les plus fréquemment retrouvés. Parmi ces huit IST, quatre d’entre elles peuvent être traitées et guéries, la syphilis1, la gonorrhée2, la chlamydiose3 et la trichomonase4. Récemment, le Centre Européen de Prévention et de Contrôle des Maladies (ECDC) a alerté sur une hausse inquiétante des IST en Europe.

Les IST, un impact sur la santé sexuelle, mais pas seulement

La transmission par voie sexuelle est souvent le seul point commun entre toutes les IST. Pour le reste, elles représentent une famille de maladies très diverses en matière de fréquence, de symptomatologie, de gravité et d’impact sur la santé et la qualité de vie.

Certaines IST, comme la chlamydiose, impactent presque exclusivement la santé sexuelle et/ou la fertilité. Mais d’autres IST affectent gravement la santé, en touchant différents organes. Parmi les 8 IST les plus fréquemment rencontrées à travers le monde, quatre sont des maladies incurables à ce jour, avec un impact parfois majeur sur la santé :

  • L’hépatite B, facteur de risque de cirrhose hépatique et de carcinome hépatocellulaire ;
  • Le virus de l’Herpès ;
  • Le VIH (Virus de l’Immunodéficience humaine) ;
  • Les Papillomavirus humains, dont certains sont directement impliqués dans la pathogenèse de certains cancers.

Par ailleurs, certaines IST peuvent être transmises de la mère à l’enfant au cours de la grossesse (transmission materno-fœtale) et/ou lors de l’accouchement. L’impact de ces infections sur la santé maternelle et infantile sont majeurs (retard de croissance, mort in utero, septicémie, prématurité, malformations congénitales, …).

Une hausse inquiétante en Europe

Dans son dernier rapport annuel épidémiologique, l’ECDC fait un point sur l’incidence des IST en Europe. Plusieurs IST montrent une hausse spectaculaire des cas, particulièrement la syphilis1, la gonorrhée2 et la chlamydiose3. En 2022, les cas de gonorrhée ont ainsi connu une hausse de près de 50 %, la syphilis a vu son incidence augmenter de 34 % et la chlamydiose de 16 %. Si les chiffres sont déjà alarmants, ils ne sont pour les experts qu’un pâle reflet de la réalité.

Beaucoup d’IST présentent peu ou pas de symptômes. Elles sont donc rarement diagnostiquées et ne viennent pas alimenter les statistiques des autorités de santé publique. De plus, d’un pays européen à l’autre, les pratiques de dépistage peuvent être différentes. En France par exemple, un dépistage de plusieurs IST (hépatite B, syphilis1, streptocoque du groupe B, chlamydiose3 et gonorrhée2) est obligatoire chez toutes les femmes enceintes dès le début de chaque grossesse. En revanche, le dépistage de l’infection par le VIH doit être systématiquement proposé, mais n’est pas obligatoire. L’accès à ces dépistages et à des services de santé sexuelle varie également d’un pays européen à l’autre. L’ECDC appelle à une harmonisation des pratiques et à un meilleur accès au dépistage et aux soins. De telles avancées permettraient de dresser un véritable état des lieux des IST en Europe et aussi d’agir positivement sur l’incidence.

De nouvelles IST et un retour en force d’IST presque oubliées

Ces dernières années ont été marquées par l’émergence de nouvelles IST, notamment :

  • L’orthopoxvirose simienne (la variole du singe) ;
  • L’infection par la bactérie Shigella sonnei ;
  • L’infection par la bactérie Neisseria meningitidis, habituellement impliquée dans des cas de méningite ;
  • Le virus Ebola ;
  • Le virus Zika.

Mais d’autres IST, connues de longue date, semblent revenir au premier plan. C’est le cas notamment du lymphogranuloma venereum (ou lymphogranulome vénérien) ou encore de la syphilis, en particulier de la syphilis congénitale. Le lymphogranulome vénérien est provoqué par une espèce de Chlamydia, différente de Chlamydia trachomatis impliquée dans la Chlamydiose3. Alors que le lymphogranulome vénérien était considéré comme rare, son incidence est en augmentation, en particulier chez les hommes ayant des relations sexuelles avec des hommes.

La syphilis congénitale1 augmente en Europe, mais aussi aux USA. D’après des chiffres publiés fin 2023, 3 755 nourrissons étaient nés avec la syphilis aux USA en 2022, contre 335 en 2012. Une multiplication des cas par onze en seulement 10 ans, qui révèle la hausse considérable de cette maladie, que certains pensaient presque disparue.

En France, l’incidence de la syphilis1 est surveillée par Santé Publique France. En 2022, 6 000 personnes de plus de 15 ans ont été diagnostiquées pour une syphilis1, soit 27 % d’augmentation des diagnostics en seulement 3 ans. Rappelons que la syphilis1, une fois diagnostiquée, peut être définitivement traitée avec une seule injection d’antibiotiques. En revanche, sans diagnostic, ni traitement, la maladie peut évoluer en quelques années vers des troubles neurologiques, cardiovasculaires et psychiatriques.

Face aux IST, l’éducation à la santé sexuelle et l’utilisation des moyens de prévention sont deux moyens efficaces et incontournables. Les efforts doivent se multiplier dans ce domaine pour infléchir la courbe d’incidence des IST. La vaccination, quand elle est possible, notamment contre l’hépatite B ou les infections à HPV, est indispensable chez tous les enfants et les adolescents, garçons comme filles. Le port du préservatif masculin reste aujourd’hui le moyen le plus efficace de se protéger et de protéger ses partenaires sexuels des IST.

 

Définitions

  1. La syphilis se présente avec des symptômes différents selon le stade d’évolution. Le stade primaire est marqué par l’apparition d’un chancre (plaie ronde et indolore, généralement dure) sur les organes génitaux ou l’anus.
  2. La gonorrhée se manifeste par des troubles urinaires, un écoulement pénien ou vaginal blanc, jaune ou verdâtre, un gonflement des testicules ou des saignements vaginaux.
  3. La chlamydiose est le plus souvent asymptomatique chez l’homme. Chez la femme, elle se manifeste par des douleurs urinaires, des douleurs abdominales et un écoulement vaginal jaunâtre ou sanguinolent.
  4. La trichomonase est le plus souvent asymptomatique chez l’homme. Chez la femme, elle provoque une inflammation de la vulve et du vagin, avec des sécrétions vaginales abondantes, d’aspect mousseux, verdâtres ou blanchâtres.
 
 

Sources

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