La pandémie de la Covid-19 a déclenché une vague sans précédent de fausses informations (fake news) en santé. Ces fakes news continuent aujourd’hui à se propager sur les réseaux sociaux, à la faveur d’algorithmes parfois peu regardants. Certains professionnels de santé (médecins, pharmaciens, sage-femmes, infirmiers, …) prennent la parole et deviennent des influenceurs sur les réseaux sociaux. Leur statut de professionnel de santé garantit-il la véracité des informations données ?
Les fake news en santé, un enjeu de santé publique pour les jeunes
En avril 2024, les 7èmes rencontres prévention santé, organisées par la Fondation Ramsay Santé, étaient consacrées aux fausses informations en santé et leur impact sur les jeunes. Étaient présentés à cette occasion les résultats d’une enquête menée auprès de 15-29 ans. Près de la moitié des jeunes interrogés (44 %) considéraient avoir déjà été confrontés à une fake news en santé. Pour les plus jeunes, entre 15 et 18 ans, ce scénario s’est même déjà reproduit plusieurs fois. Et plus d’un tiers d’entre eux ne vérifient pas la véracité des informations en santé qu’ils consultent sur les réseaux sociaux.
Fausses informations, théorie du complot, … comment les jeunes – et les moins jeunes – peuvent-ils décrypter le vrai du faux ? Les jeunes interrogés dans cette étude se tournent vers plusieurs options :
- Développer son esprit critique pour 23 % d’entre eux ;
- S’appuyer sur les connaissances apprises à l’école pour 18 % des jeunes ;
- S’informer en priorité auprès de leur médecin pour seulement 41 % des 15-29 ans interrogés ;
- Faire des recherches complémentaires sur internet pour 23 % d’entre eux.
Les jeunes, les plus vulnérables face aux fake news en santé, ne se tournent pas nécessairement vers leur médecin pour vérifier les informations. Ils peuvent ainsi rencontrer des difficultés pour démêler le vrai du faux, avec un impact possible sur leur santé à court, moyen ou long terme.
Démêler le vrai du faux en santé, quelles solutions ?
Les fausses informations ou idées reçues sont nombreuses et touchent tous les domaines de la santé, la vaccination, les origines des maladies, les effets des traitements, les remèdes miracles, etc. Elles peuvent entraîner des conséquences parfois majeures sur la santé. Il est donc essentiel à la fois de lutter contre la circulation des fake news et de garantir la diffusion d’informations fiables.
Sur internet, se retrouvent pêle-mêle des sites d’information destinés au grand public. Mais comment être sûr de la véracité et de la rigueur scientifique des informations trouvées sur ces sites ? Les autorités de santé publique donnent quelques conseils incontournables :
- Consulter des sites officiels des autorités de santé publique, comme le site de la Haute Autorité de Santé (HAS), de l’Agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé (ANSM), de l’Institut National du Cancer (INCa) ou de l’Agence Nationale de Sécurité Sanitaire de l’Alimentation, de l’Environnement et du travail (ANSES) ;
- Consulter les sites dédiés à l’information du grand public, développés par certaines sociétés savantes ou autorités de santé publique, comme le site Ma bouche ma santé de l’Union Française pour la Santé Bucco-Dentaire (UFSBD) ou le site Dermato-Info de la Société Française de Dermatologie ;
- Demander conseil à son médecin ou son pharmacien pour s’assurer de la véracité des informations trouvées sur internet. Les professionnels de santé peuvent indiquer aux patients des sites d’information fiables ou leur remettre des documents d’information.
Enfin, l’INSERM a développé un site internet dédié au décryptage des fausses informations trouvées sur les réseaux sociaux, le Canal Détox. Chaque mois, une nouvelle idée reçue ou une fake news est décodée, études scientifiques à l’appui. Parallèlement, les professionnels de santé ont également décidé de prendre la parole sur les réseaux sociaux, en devenant eux-mêmes influenceurs.
Des professionnels de santé influenceurs, la garantie d’une information médicale fiable ?
D’après la Fédération Nationale de l’Information Médicale, il y aurait environ 150 000 influenceurs en France, tous secteurs confondus. S’il est difficile d’évaluer précisément le nombre d’influenceurs en santé, on retrouve parmi eux des professionnels de santé (médecins, pharmaciens, infirmiers, …). Plusieurs d’entre eux sont désormais bien connus du grand public et multiplient les vues sur les réseaux sociaux. Citons par exemple le Dr. Corentin Lacroix, médecin généraliste, influenceur sur YouTube, avec 3 000 à 4 000 vues par jour et créateur d’un site gratuit de vulgarisation baptisé WhyDoc.
Leur statut de professionnel de santé est susceptible d’augmenter la confiance des internautes, mais est-il un gage suffisant pour s’assurer de l’absence de fake news ? Si la Loi encadre désormais les règles de l’influence commerciale en France, chaque influenceur reste responsable de sa ligne éditoriale et de la qualité de ses contenus. Or, des dérives ont été constatées sur les contenus médicaux diffusés sur Internet et les réseaux sociaux, y compris par des professionnels de santé. Ce constat a poussé l’Ordre des Médecins – en partenariat avec la chaîne YouTube – à développer une charte définissant les 10 principes du médecin créateur de contenu responsable. Si l’Ordre des Médecins réaffirme la possibilité – et l’intérêt pour les patients – pour les médecins de délivrer du contenu pédagogique sur internet et les réseaux sociaux, il leur demande plus de transparence sur leur diplôme, sur les contenus diffusés et sur l’information de cette activité auprès de l’Ordre.
Déjà en 2021, le LEEM avait publié un livre blanc sur les fake news en santé, en particulier sur les médicaments. Des experts avaient alors émis cinq recommandations pour lutter contre les fake news, notamment “doter les professionnels de santé d’outils pour lutter contre les fake news sur le médicament” et “faciliter le fact-checking ou journalisme de vérification – en particulier des faits relatifs au médicament”.
La prise de paroles sur les réseaux sociaux ou internet des professionnels de santé offre la possibilité de garantir un contenu scientifique et médical vérifié et de qualité pour les Français, à condition que chaque professionnel s’assure de respecter le cadre déontologique.
Sources
- Conseil National de l’Ordre des Médecins. Une charte du médecin créateur de contenu responsable. 16 janvier 2025. https://www.conseil-national.medecin.fr/publications/actualites/charte-medecin-createur-contenu-responsable
- Service Public. Santé : comment démêler le vrai du faux ? Consulté le 20 février 2025. https://www.service-public.fr/particuliers/actualites/A17686
- Ramsay Santé Espace Presse. Lutte contre les fake news dans le domaine de la santé : 44% des 15-29 ans estiment avoir déjà été victimes d’une infox. 4 avril 2024. https://presse.ramsaygds.fr/communique/221537/Lutte-contre-fake-news-dans-domaine-de-sante-44-15-29-ans-estiment-avoir-deja-ete-victimes-d-infox?cm=1