Le « partage des tâches », une solution contre les déserts médicaux ?

Les déserts médicaux concernent de plus en plus de territoires, privant des populations de plus en plus importantes d’un suivi médical de qualité. Un tel contexte oblige les professionnels de santé à se rapprocher pour trouver ensemble des solutions pour rouvrir les portes du système de soins à de nombreux patients en difficulté. Après des mois de débats, les sept instances ordinales des professions de santé (médecins, kinés, infirmiers, pédicures-podologues, chirurgiens-dentistes, sages-femmes, pharmaciens) sont arrivées, le 13 octobre 2022, à un accord historique sur le « partage des actes ». Décryptage.

Une révolution en cours

Cet accord inédit est en passe de révolutionner le secteur de la santé. Alors qu’aujourd’hui, le médecin généraliste est la porte d’entrée dans le système de santé, demain il sera possible pour tout professionnel de santé d’être le point de départ d’un parcours de soins pour un patient qui n’a pas de médecin traitant. Le transfert de certains actes à d’autres professionnels de santé pourrait aussi permettre de libérer du temps aux médecins. En déléguant certains soins, ils pourraient, en effet, augmenter le nombre de patients reçus en visite chaque jour. Au vu des disparités territoriales en matière de services de santé, cet accord va donner la possibilité à chaque territoire de construire son « offre de santé » en fonction des moyens dont il dispose. Si petite révolution il y a, il n’en reste pas moins que le médecin généraliste continuera de coordonner l’équipe de soins.

Dans cette nouvelle configuration du système de santé, les infirmières et infirmiers libéraux pourraient être les « grands gagnants ». Eux qui étaient souvent assignés à un rôle d’auxiliaire, bien qu’omniprésents chez les patients, pourraient bien devenir le second acteur majeur du système de santé français. Des actes devraient ainsi leur être transférés, de même qu’aux kinés et aux pharmaciens, aux sages-femmes…

Des contours à définir

Si cette décision marque un tournant dans le processus d’accès aux soins, de nombreux paramètres restent à définir. Dans les semaines à venir, l’État et l’Assurance maladie vont travailler en collaboration avec les différents Ordres pour déterminer notamment les actes qui pourront être partagés. Il faudra, qui plus est, discuter des conditions d’exercice des libéraux. Les conditions financières qui pourraient inciter les professionnels de santé à décliner le contenu de l’accord sur le terrain devront, en outre, être débattues.

À noter également que le transfert des actes se fera par territoire et au cas par cas. En effet, chaque région dispose de moyens différents et il faudra s’adapter sur le terrain. La nécessité de faire monter en compétences les soignants apparait aussi plus qu’indispensable pour pouvoir proposer à chacun une qualité de soins égale, quel que soit le professionnel de santé visité.

Pour une entrée en vigueur rapide de ces nouvelles mesures, il est attendu du Gouvernement qu’il publie rapidement certains textes et décrets d’application nécessaires. Une fois le partage des tâches effectif, il faudra encore communiquer auprès de la population de ces changements. Sa compréhension de ce nouveau système et son adhésion à celui-ci, seront, en effet, indispensables à son efficacité dans la lutte contre les déserts médicaux.

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